Covid 2020 les symptômes politiques

« Ces temps troublés n’ont fait que renforcer une question jamais entièrement résolue : comment gouverner effectivement la société humaine dans la continuité ? Comment susciter l’adhésion, surtout lorsque la vie, au sens biologique et humain, est en jeu ? Quel qu’il soit, le gouvernement fut directement saisi de l’intégrité physique des administrés qu’il devait protéger. Dans l’espace public, le discours abstrait du monde politique a côtoyé le discours complexe du monde scientifique.

L’intensité et la menace exceptionnelles de la pandémie ont changé, du moins dans un premier temps, le débat ordinaire sur la santé publique au profit d’un consensus apparent sur l’urgence nationale. Mais la sphère politique et le monde scientifique ont du gérer une interdépendance aux frontières du pouvoir et du savoir.  Le Covid-19 a remodelé des éléments de langages et les représentations qui leur sont associées, dans le langage courant comme dans le discours politique. Nous prendrons quelques exemples issus de la république populaire de Chine et de la république française.

Lorsqu’un virus biologique contamine la sphère politique, son emprise est multiforme. On a observé ses effets sur des élus, des processus électoraux, dans un rapport complexe entre la maladie et le statut de citoyen, la continuité du fonctionnement des institutions et la nécessité de protéger la collectivité. Le Covid-19 a remis en cause la collectivité nationale, dans ce qui lui donne corps et
vie et qui est également source de sa fragilité potentielle : sa dimension humaine, sa construction culturelle, son territoire, son histoire, ce que l’on nomme habituellement ses caractéristiques objectives alimentant un sentiment d’appartenance.

Menace commune et reconnue comme telle, le Covid-19 ne fut pas un élément d’unité de la scène internationale, ne générant qu’une coopération réduite. L’épidémie a simultanément aboli les barrières frontalières par la circulation du virus et les a renforcées, par les effets successifs de contamination et de protection. « Nous vivons une période historique, du jamais vu ». Ce fut le constat général formulé au sujet de la pandémie Covid-19. Il est toujours inconfortable de vivre l’histoire au présent, car on en mesure la portée réelle que bien plus tard. Cependant, l’idée d’une sortie de crise implique aussi le positionnement de cette période vécue dans l’histoire. Il est possible de dire, par commodité, que l’on assiste à l’émergence d’un monde nouveau, en sachant parfaitement que sa définition sera très délicate et que cela ne suffit pas forcément à définir d’autres perspectives.

Imaginer une pédagogie de cette catastrophe implique de dépasser le temps de l’urgence. La première étape consisterait à rappeler quelques éléments de classification. Le Covid-19 est une catastrophe sanitaire, la gouvernance politique la distingue clairement d’une catastrophe dite naturelle, telle qu’un tremblement de terre ou un ouragan, ou encore une catastrophe industrielle ».